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MATAR, MATAR, MATAR. , 2023
Exposition I Commissariat Valérie Knochel Abecassis, La Maréchalerie, centre d'art contemporain, ENSA-Versailles
Production Mondes nouveaux et La Maréchalerie - centre d'art contemporain / ÉNSA Versailles, 2023

Né à Tunis en 1991, issu d’une lignée engagée dans la vie religieuse, sociale et politique du monde arabe, Chedly Atallah questionne l’Histoire et la mémoire à partir des souvenirs familiaux. Dans ses journaux intimes - témoignages d’un homme partisan de la libération de la Tunisie et de l’utopie d’un monde arabe uni - son grand-père Chadli Atallah commente chaque jour, de 1924 à 1981, les événements de la petite et de la grande Histoire. 

 

À La Maréchalerie, les réflexions intellectuelles du poète Chadli Atallah sont nourries d’une enquête contemporaine de l’artiste. Entre la Tunisie et la France, une anthologie d’archives privées et publiques donne lieu à des productions photographiques et filmiques récentes. Dans un processus de création à deux têtes, Chadli et Chedly Atallah composent la matière et la partition des œuvres de l’exposition.

 

Dans chaque œuvre apparaissent les indices d’une intimité et d’une actualité locale ou internationale : les bassins des Aghlabides, voisins de la maison familiale à Kairouan où Chadli Atallah est arrêté ; l’architecture de l’artillerie coloniale de Montauzan à Sousse, camp de rétention où celui-ci est incarcéré le 14 mai 1943, les images de la conquête spatiale et des premiers pas sur la Lune en 1969 par la mission Apollo, l’inondation qui engloutit Sousse et Kairouan. Ambitions politiques, crises écologique et culturelle s’entremêlent faisant surgir au présent les images récentes de la révolution arabe, les luttes pour la démocratie ou cet homme tirant sur les vacanciers d’une plage de Sousse.  

 

MATAR, MATAR, MATAR. est une étendue « déluge », un paysage de mémoires où l’intime se mêle à l’universel. La Maréchalerie devient le réceptacle imagé de l’eau, métaphore du souvenir. L’eau que l’on rêve dans le film Istisqa, prière qui implore la pluie au Tout-Puissant durant les périodes de sécheresse, et Le chant de la pluie de Badr Chaker Essayeb. La sculpture Faskia se positionne en icône de cette eau convoitée. L’eau que l’on craint, celle du cataclysme et de l’horreur. Envahissante, l’eau efface toutes traces de vie et lorsqu’elle se retire, elle fait place à la résurgence de l’indicible et l’apparition d’une mémoire. L’eau parfois purificatrice, filtre aux douleurs du passé, de la violence, des guerres et de la mort. 

Pluie, Tuer, S’envoler. 

MATAR, MATAR, MATAR.

 

Comme si l’œil du visiteur se calait à celui du poète, il est aussi question de regard et de perception troublée. MATAR, MATAR, MATAR. donne à voir, de façon fantasmée et diffuse, des fragments d’histoires. Une œuvre construite par strates, comme les pages du carnet. Ici l’installation, Le chant de la pluie esquisse l’architecture de l’enfermement, de la ruine, ou bien les cellules vivantes de la pensée : une calligraphie arabe gravée dans l’argile, un texte en braille imprimé sur une peau en silicone, un morceau d’architecture, un moulage de l’antique, des projections visuelles …

 

Le poète Chadli Atallah est mort en 1991, année de naissance de Chedly Atallah. Les contours du souvenir se liquéfient. La mémoire reste pourtant vive et parle à son insu. MATAR, MATAR, MATAR. offre à ceux qui acceptent de la voir, une possibilité de démontrer la fiction des narrations : une mythologie à travers des expériences vécues, au premier abord étrangères, qui pourtant sont étroitement liées et construisent l’Histoire.

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